LA BATAILLE DE LA SOMME

<= L'armée française de l'été 14


Carte de la bataille de la Somme

Des centaines de batteries lourdes tonnaient à Combles et tout autour; des obus sans nombre se croisaient, hurlant et miaulant, au dessus de nous. Tout étatit enveloppé d'une fumée épaisse, éclairée de lueurs funèbres par des fusées de couleur. Sous l'effet de violentes douleurs dans la tête et les oreilles, nous ne pouvions nous entendre qu'en braillant des mots sans suite. La faculté de penser logiquement et le sens de la pesanteur semblaient paralysés. On était en proie au sens de l'inéluctable et du nécessaire, comme devant la fureur des éléments. Un sous-officier de la troisième section devint fou furieux - Ernst Jünger - Orages d'acier - Guillemont

Quand vint l'aube les environs inconnus se dévoilèrent peu à peu à nos yeux stupéfaits. Le chemin creux nous apparaissait maintenant comme une série d'énormes entonnoirs, remplis de lambeaux d'uniformes, d'armes et de morts; à perte de vue, le terrain environnant était complétement retourné par des gros calibres. pas un seul brin d'herbe auquel pût s'accrocher le regard. Ce champ de bataille labouré était horrible. les défenseurs morts gisaient pêle-mêle parmi les vivants. En creusant des trous pour nous terrer, nous nous aperçumes qu'ils étaient empilés par couches les uns au dessus des autres. Les compagnies qui avaient tenu bon sous le pilonnage avaient été fauchées l'une aprés l'autre, puis les cadavres avaient été ensevelis par les masses de terre que faisaient jaillir les obus, et la relève avait pris la place des morts. C'était maintenant notre tour - Ernst Jünger - Orages d'acier - Guillemont